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La Fille Contrastée

Jour 1

Je ne vois ni le blanc, ni le noir. Le noir m’éblouit tandis que le blanc m’aveugle. Il fut un temps où je les aimais, ces couleurs, où j’aimais ce qu’elles me montraient. Un monde propre, celui d’un enfant qui ne voyait que deux couleurs : le noir et le blanc. Et puis, petit à petit… ma vue a baissé. Moi, je m’en moquais, cela me plaisait, de voir sans regarder un monde flou, atténué, avec des contours mais sans rien de vif, de blessant. C’était doux, comme cocon.

Mais peu à peu, les autres se sont mis à s’inquiéter, à me montrer à des médecins. Verres prescrits, montures essayées, lunettes payées… la réalité jaune de ce monde m’atteignit en pleine face. Je ne voyais plus le blanc, je riais jaune. Vint alors une période où je fermai les yeux sur le noir.

Je me souviens encore de ce jour où, réfugié dans la chambre de ma soeur, je m’amusais à lire l’avare de Molière, livre aux pages jaunies par mes yeux, sans le comprendre. Je lisais beaucoup sans comprendre, avant. Je ne comprenais rien, rien du tout, et pourtant je m’en foutais, du moment que je lisais. Je lisais tout et n’importe quoi, sans discerner le vrai du réel ou l’emprunté du faux. Je lisais tout sans rien trier, et maintenant tout est en bordel dans ma tête. C’est bizarre.

Je lisais sans lire.

Et maintenant, je vois sans regarder, mes yeux papillonnent ou fixent le sol. C’est plein de détails que je ne vois pas, un sol. Qu’il soit en goudron ou en sable, recouvert d’herbe ou totalement nu, il y a plein de choses, par terre, que personne ne prend le temps d’observer, et moi moins que les autres.

Je vois sans voir, je ne discerne rien, je pense et parfois je me demande même si ce que mes yeux voient sans que mon cerveau comprenne n’est pas le fruit d’un songe, d’un merveilleux songe digne de mes pires cauchemars. Réalité transformée par mes rêves, mauvaise connexion yeux/cerveau qui me déconnecte d’un vrai toujours plus gris, toujours moins contrasté.

J’ai abandonné les lunettes, tordues dans le sillon de mes rêves. Je préférais me voiler la face plutôt que d’être blessé, écartelé par une lumière trop nette, pas assez sombre. Peu à peu, je me suis perdu, dans le noir que je ne voulais plus voir, dans le blanc que je ne supportais plus, dans les couleurs floues qui m’assaillaient de plus en plus. Bientôt plus d’yeux, plus de cerveau, plus rien pour me faire pulser et vivre, mon corps ressemble à une écorce vide et délabrée.

Vide d’âme qui s’est enfuie par mes yeux.

Jour 2

Je marche. Tout seul, comme d’habitude. Je fixe le sol. Parce qu’il y a plein de belles choses, au sol. Par terre. Des feuilles, des pétales chiffonnés en cours de décomposition, de frêles brins d’herbe émergeant en ilot de cette couche imperméable et stérile qui recouvre le trottoir. Des grains de sable minuscule, des poussières, des bouts de vie. Des fourmis et, plus bas, profond, caché, des vers, des décomposeurs, peut-être une taupe perdue et maintenant emmurée.

Et moi, je contemple tout ça en marchant, pour éviter d’écraser ces trésors, enfin, surtout pour ne pas regarder devant moi. Un petit coup d’œil, de temps en temps, pas plus. J’ai peur de regarder les gens, de les voir et de voir qu’ils me voient, moi aussi. Peur de me voir dans un miroir. Parfois, je lève la tête pour regarder le vol d’un oiseau. J’espère toujours qu’un jour, il reviendra vers moi, n’importe lequel, il faut bien qu’un de ces oiseaux dont je m’emplis les yeux quand ceux-ci veulent bien voir revienne vers moi un jour. Mais toujours rien.

Que ce soit un pigeon ou un moineau, une buse ou un faucon, et même une mouette pas trop farouche venant manger dans ma main, tous me lâchent. Tous repartent.

Et comme je ne peux pas les suivre en volant, je marche les yeux rivés au sol. Le paysage défile sans que je ne m’en lasse jamais, sa diversité foisonne et chavire mon esprit. Soudain, tout est chamboulé, mes pieds refusent de faire un pas de plus, mon cœur est sur le point de vomir son mal sur cette poésie rompue, endiguée par une humanité sotte et crade.

Un papier de bonbon.

Un papier de bonbon gâche le paysage de mon évasion quotidienne. Une stupide trace d’humain, un bout de plastique polluant et si caractéristique ! Ceci suffit à faire entrer un petit insecte dans mon cerveau, je l’entends bourdonner dans mes oreilles, derrière mes yeux, s’installer dans mes tempes… Je reste là, planté comme une fleur dans un stupide vase, piquant du nez vers ce sol autrefois si parfait dans son hétérogénéité et à présent déséquilibré, enfin, c’est moi qui suis déséquilibré par ce morceau d’emballage de nounours de gomme arabique allemands.

Le problème susurré par ce moucheron dans ma tête ne trouve pas de solution, je tourne à blanc, l’esprit vide. Une longue minute passe, puis une autre. Mes mains, enfin, exaspérées par cette attente dont elles ne connaissent pas la raison précise mais qui se l’imaginent bien, depuis le temps qu’elles me fréquentent, sortent de leur poche et me lancent en avant, attrapant délicatement l’objet incongru pour le faire emprisonner dans mon blouson, loin de mes yeux qui s’en rendent malade, de ce bout de plastique malsain.

Jour 3

C’est pathétique. Tous les matins, elle et moi, on fait la course. Au départ, je ne l’entends pas, ses pas sont rythmés sur les miens. Puis, peu à peu, elle accélère la cadence alors, forcément, je me presse. En général, elle me double juste devant les escaliers. Et moi, essoufflé comme tout, je baisse les bras. De toute façon même quand j’arrive en premier, nous sommes au même degré, l’un en face de l’autre. C’est une fille qui ne sait pas perdre son temps.

Elle est blonde, a souvent ses longs cheveux détachés et porte depuis quelques temps un manteau rose pêche et noir ou blanc, je ne sais pas, je ne veux pas lever les yeux. Elle ne fait jamais ses lacets. Je pense que si je me penche pour les lui faire, tout le monde va me prendre pour un fou. J’ai souvent envie de marcher dessus, pour lui apprendre. Elle devrait faire ses lacets.

Jour 4

J’ai encore court-circuité. Je n’en peux plus, chaque pas dans cet environnement hostile me rend dingue. J’ai envie de m’enfuir en hurlant, de mordre avec toute la sauvagerie dont ces gens font preuve en laissant traîner des emballages qui leur survivront mille ans en terre quand bien même eux ne seront plus que poussière de calcium.

J’en viens même à oublier ce que je fais là et je marche mécaniquement, ma vision se floute pour m’épargner par un voile protecteur d’horribles sensations. Les nuits passent comme les jours dans un état de veille grisâtre, je ne vois pas plus loin que dans un brouillard mort qui ne surprend pas.

D’habitude, j’aime bien le brouillard, j’aime bien m’embrouiller.

Mais aujourd’hui, je me sens hébété par ce bitume crade, presque lénifié par cette quantité de saleté si peu naturelle. J’ai essayé de comprendre, essayé de pardonner. Mais je ne comprends pas et ne parviens pas à excuser une société qui consomme trop avant sa date de péremption, comme si vivre après quarante ans était impensable. Moi, je me hâte lentement, je me fais dépasser de toute part et je regarde sans les voir ces visages exempts de toute netteté douce qui fusent autour de moi, courent après un temps qu’ils gaspillent en semant leurs plastiques dans la face de ceux qui ont peut-être finit par comprendre qu’une vie, au final, c’était déjà bien assez long pour ne pas vouloir la remplir plus qu’il ne faut.

Mes baskets ne me serrent plus et mécaniquement je me penche pour refaire mes lacets. Un cliquetis et une chaussure suivie par sa laisse passent à côté de ma main qui, par réflexe, se saisit de ce fil à lacer et tire. Une exclamation, un coup d’œil qui pourrait passer pour méprisant et elle repart, je n’ai vu d’elle qu’une tâche jaune ne formant même pas une auréole convenable.

Je suis les cours sans en être, quasiment tout glisse sur moi, quasiment seulement car mes yeux sont attirés dans leur coin droit, quelqu’un s’assoit à côté de moi. Je ne parle pas, ça fait bien trois mois que je ne parle plus, je ne vois pas pourquoi je recommencerais aujourd’hui.

Elle a enlevé son manteau rose pêche coupé comme un mauvais vin de noir et a dialogué pour deux.

Jour 5

Je pourrais devenir fou. Je vais sûrement le devenir. Je pourrais envoyer des lettres anonymes à tout le monde, dessinées grâce à des caractères découpés au couteau dans un vieux journal, peut-être même photocopiés pour que j’ai tous les mêmes. Des « a » de 4cm² exactement, des « l » de 5cm de haut à tous les coups… Et puis je posterais mes lettres partout. Des milliers de lettres qui dénonceraient tout ce que mes yeux ne devraient pas voir, tout ce que je me refuse à comprendre, tous ces hommes…

Puis, vu que ça ne suffirait pas, je me réveillerais la nuit, quittant les bras d’un Morphée trop humain me soufflant sa came dans les cauchemars, je marcherais tout seul dans le noir, suivi par une ombre engloutie dans l’obscurité trop franche pour moi.  Et un beau jour, ça me prendrais comme ça, je ramasserais un de ces déchets innombrables, mais je ne saurais pas quoi en faire. Mais je ramasserais toujours plus, amassant dans mes bras un trésor de pauvreté de l’esprit, jusqu’au moment où je saurais m’en débarrasser. Je fracturerais la portière d’une voiture au hasard, je la bourrerais jusqu’à la gueule de toutes ces saloperies qui courent fixement les rues.

Des voitures-poubelles fleuriront sur mon chemin, aléatoirement.

Qui sera la prochaine cible ? Nul ne le sait, encore moins moi, je le ferais au gré de ce que décident mes mains pour qui la coupe pleine est trop lourde à porter.

Je deviens fou, cette fois c’est sûr.

Je vais peut-être prendre le tram, arrêter de marcher un peu.

Juste pour quelques temps.

« Petite note.

Je m’incruste dans ton univers. J’ai choisi ce moyen pour m’exprimer. Peut-être qu’un jour tu reliras ce journal. Tu repartiras en arrière.

Voilà, j’ai trouvé une page blanche. Juste avant notre rencontre consignée par tes soins. Peut-être que tu l’as fait exprès, me laisser une page blanche rien que pour moi, pour que je te laisse une surprise. Pour que tu aies encore quelque chose de moi à découvrir quand bien même je ne pourrais plus rien t’offrir. Alors voilà. Je t’offre ma page blanche quasiment noire de mots.

Lise »

Jour 11

J’étais dans le tram lorsque je l’ai vue pour la première fois. Je déprimais, comme d’habitude, à moitié endormi. Prendre le tram à 6heures du mat’, ça aide pas sur l’humeur. Et je l’ai vue. C’est comme… Je ne sais pas la décrire, cette fille. Un jour toute de noir vêtue, le lendemain bariolée, avec toujours un petit détail qui ressort, un contraste, une ambivalence. Mais qu’elle soit rouge vif sur noir ou ultra-violet sur blanc, je la reconnais, alors que pour mes yeux tout le monde se ressemble. Elle, elle n’est pareille qu’à elle-même dans sa différence.

Cette année, on a vu fleurir les manteaux rouges, énormes coquelicots d’hiver distribuant leur pavot de grisaille dans les rues d’une ville qui m’a parue encore plus moche, sur le coup. Mais elle était la seule à revêtir un manteau orange vif, tirant sur le rouge mais ô combien éloigné de ces petits chaperons de Noël fades et identiques !

Bien sûr, je ne l’avais jamais vraiment regardée jusqu’à aujourd’hui, mais ce manteau s’est imprimé par sa couleur sur ma rétine désespérément grise, formant une tache aveugle colorée, comme lorsqu’on fixe une lampe. Je me suis brûlé le coin de l’œil, sur ce manteau vermeil.

"Deuxième petite note :

Hello. j'ai peur des autres humains, de ce qu'ils pensent. De ce qu'ils pourraient dire sans le penser, aussi. J'ai peur de ce qu'ils pourraient dire, parce que je pourrai comprendre comment ils l'ont pensé. Et cela me détruit à chaque fois.

Lise."

Jour 12

Je n’ai pas pu empêcher mes yeux d’aller se frotter sur ses vêtements si bizarres.

Elle m’a vu la regarder, m’a regardé et s’est approchée comme ça, m’a tendu la main et souriant.

« Salut, je m’appelle Lise. »

Et aussitôt, pleine de contradiction, baisse la tête.

« Moi c’est Guilhem. »

Relève les yeux, sourit encore, puis devient sérieuse.

« C’est pas courant, ça, Guilhem. »

Dans sa bouche, ce prénom si peu commun que j’ai l’habitude de détester devient doux, agréable à entendre. Il roule sur sa langue comme un bonbon acidulé dont je suis déjà fou. J’en mangerais à longueur de temps, des sucreries de ce type. Piquantes mais si onctueuses ; pourquoi personne n’a jamais songé à les commercialiser ? Je me force à éloigner mes pensées de ses lèvres si proches de mon visage qui restent immobiles et je descends précipitamment à un arrêt qui n’est pas le mien.

Jour 13

Aujourd’hui, la fille s’est assise à côté de moi, direct, sans demander mon avis. Je fixais la vitre du tram qui commençait à s’éclaircir avec la venue du printemps et sa couleur m’a distrait de mes idées grises. De la couleur, pour sûr qu’elle en arborait ! Pas dans ses vêtements, non, elle était assez classique, mais ses lèvres ! Aucune cerise, la plus mûre et juteuse soit-elle, n’aurait pu égaler ce rouge que relevait son visage lumineux comme un clair de lune et ses cheveux noir corbeau. Chevelure longue, uniforme si ce n’était la discrète mèche rose qui s’échappait de la prison bigarrée, un ruban arlequin aussi acidulé que les fameux bonbons et qui emprisonnait tous les petits cheveux fins et fous qui osaient dépasser.

Elle a parlé ! Elle m’a noyé sous un flux de parole insipide que j’ai tout de suite occulté, privilégiant ses yeux qui m’ont semblé morts, comme s’ils ne croyaient pas plus que moi à l’intérêt de ce qu’elle racontait. Des yeux sans âme, qui ne voulaient ni se fermer ni voir le monde, qui ne savaient pas où ils étaient et questionnaient tous ceux qui croisaient leur regard à ce propos.

J’aurais dû clore ces couples de lèvres et d’yeux par un baiser rapide esquissé sur un coup de tête mais une main a enserré mes tripes, m’empêchant d’avancer.

Un sourire a réanimé soudainement ces yeux déjà vitreux. Un sourire soleil a illuminé ma matinée grisée par ce réveil dans le tramway.

Puis disparition de cette fille qui sourit aux inconnus.

« Petite note trois.

Très vite, j’ai accaparé ton attention avec une saute d’humeur de mon âme, enivrée par cette occasion de dire tout ce qui lui passe par ma tête. Puis c’est mon arrêt, je dois descendre, mon âme boude de devoir finir de se montrer en spectacle aussi vite.

Mais tu sais, on ne me voit pas quand mon âme se tait, mon âme désabusée, cette foutue âme désenchantée. Alors parfois, je préfère la laisser parler à ma place. »

Jour 36

Elle m’a surpris, aujourd’hui. Deux longues semaines sans apercevoir ce conflit quotidien et lorsqu’elle m’est revenue, adieu chevelure souple et brillante comme un rideau de nuit ! Ses cheveux avaient discuté avec une lame de rasoir, celle-là même qui m’avait posé un lapin. La lame l’avait rackettée et s’était enfuie avec toute une brassée de ces épis noirs d’ergot de seigle, que je reniflais autrefois secrètement pour droguer mes narines à ces effluves de LSD.

Adieu, nuit noire et sombre dans laquelle mes doigts plongeaient en pensée à la recherche des étoiles fluo de ses boucles d’oreilles ! Maintenant turquoise et courts, ses cheveux s’ébouriffaient dans tous les sens.

Bleu turquoise ! Cela m’avait offusqué. C’est comme un adieu à tous ces oranges que tu aimais porter et qui choquaient ma rétine délicieusement, la  réveillaient le temps d’une discussion avec toi !

« Pourquoi adieu ? », m’avait-elle demandé.

« Mais parce que le orange, ça jure avec le bleu turquoise ! »

Mais non, je m’étais trompé, ses cheveux ne juraient pas avec ses sous-vêtements.

Elle m’a regardé, sérieuse, puis elle a baissé les yeux et murmuré tristement, les bras serrés sur son ventre blanc qui prenait le soleil.

« Je n’aime pas les adieux. »

Puis aussitôt son sourire m’éblouit et sa main passe machinalement dans ses cheveux, écartant chaque mèche de ses doigts fins comme des allumettes, les ébouriffant encore plus qu’ils ne le sont déjà.

Elle ressemble à une allumette, cette fille. Fine comme tout, pas épaisse, pas grande, elle s’enflamme pour un rien ou s’essouffle avant même de commencer. On a envie de la placer entre ses dents et de la mordiller, comme ça, pour faire chic. Comme les gangsters dans les films, ou Lucky Luke et son brin d’herbe. Pas sûr qu’elle se laissera faire. On est sûr de rien avec une fille pareille.

Elle s’est habillée, ma fille-allumette, a passé un jean, a enduit ses paupières de bleu. Je m’attendais à ce qu’elle s’arrête là, qu’on sorte, mais non, elle a recouvert son soutien-gorge orange soleil d’un col-roulé violine.

J’avais oublié le contraste, chaviré que j’étais par l’ensemble magnifique que formaient sur elle le bleu et le orange. Le charme a été rompu par cette immensité sombre de violet et j’en suis resté gris d’avoir été privé du orange gainant son torse.

Plus qu’un sobre ruban noir et on sortait enfin. Elle prit au passage sa casquette noire qui la faisait ressembler à un gosse des rues et son sourire s’agrandit. Mais moi, je ne voyais plus que des taches oranges qui s’étaient imprimées sur ma rétine, comme son foutu manteau de chaperon rouge décoloré par le soleil de ses sourires.

Elle m’avait dit de monter, elle était presque prête pour cette petite promenade prévue depuis au moins tout ça. Choqué par ce bleu subit, je n’avais même pas remarqué qu’elle ne portait pas grand-chose d’autre qu’une chemise noire.

Mais pourquoi l’avoir retirée devant moi ? Pour me prouver que j’avais tort ? Qu’elle était la seule personne sur laquelle le turquoise pouvait demander en mariage le orange ? Que le chaud et le froid n’étaient pas forcément contradictoires, comme le soleil et la mer ? Qu’elle est la fille contrastée…

Je sens bien que cette question me hantera longtemps et elle, elle sera bien trop timide pour y répondre. Timide alors qu’elle s’est payée l’audace de s’affaler à mes côtés sur ma place de tram ! Un bandeau orange ceint mon esprit, il se ressert et je m’essouffle, manquant d’air, scotché par le culot de ce petit bout d’allumette. Croit-elle vraiment que je suis gay ? Ou bien s’aime-t-elle aussi peu qu’elle en distribue son image au premier péquenot du coin, un mec rencontré dans le tram ?

Je la connaissais prude, je l’imagine à présent salope, dispersant sa couleur aux quatre pieux, aveuglant d’autres yeux que les miens de son affront craintif d’oiselle qui bat de l’aile.

Je la déteste comme son foutu manteau, ces contrastes forts qui me tuent et que j’aime parce qu’ils rendent mon monde encore plus gris, encore plus sale. Elle est un monde à elle toute seule.

Jour 43

« Et si on sortait ensembles ? »

J’ai été surpris. Machinalement, j’ai dit oui. Quand je sais pas, je dis toujours oui.

Je peux pas aller chez elle. C’est le bordel, dès que je rentre je cherche à tout ranger. C’est éreintant, surtout quand ça ne sert à rien. Alors elle vient chez moi.

Ça l’a un peu crispée, la dernière fois, quand je lui ai dit qu’elle pouvait pas venir lundi prochain parce que je sortais avec une amie. Elle m’a demandé si elle pouvait venir et, vu que je savais pas, j’ai dit oui.

La fille-allumette s’est renfermée quand elle l’a vue accrochée à mon bras comme un quelconque parasite duveteux et blond. Bien sûr, elle a continué à sourire, mais pas comme d’habitude. Son sourire soleil, son sourire vie était planqué, altéré par un gros nuage de contrariété qui allait soit se déchaîner dans la pire des tempêtes orageuses, soit passer avec le vent, selon que l’on gratte l’allumette ou non. Bien malgré moi, je n’ai pas pu m’empêcher de me demander si elle portait aujourd’hui ce soutien-gorge magique qui soutient les bleus trop froids. Apparemment, cela s’est vu.

« Tu veux que je t’aide ? »

Pas la fille contrastée, non, elle elle fixait le flou du loin, essayant de se décider pour la pluie ou le beau temps. Au final, ce n’est pas elle qui a éclaté.

« T’es vraiment con ! »

Et elle est partie comme ça. J’espère que je vais oublier son nom.

« Je suis désolée. »

C’est ce qu’elle a chuchoté, ma petite fille-bout-d’allumette, toujours le vague dans les yeux mais sans pouvoir empêcher un discret sourire de reprendre sa juste place sur le trône d’argent de son visage.

« De quoi ? »

Et c’était vrai, je ne comprenais pas pourquoi elle s’excusait. Elle m’a regardé, légèrement confuse, un peu beaucoup espiègle.

« Elle vient de te quitter. »

Je n’ai pas pu m’empêcher de dire oui, alors que ce n’était pas une question. Pour faire bonne mesure, me justifier, j’ai quand même continué.

« De toute façon, c’était mal rangé, chez elle. »

Elle a ri franchement, une lueur inquiète clignotant dans son œil.

« Et chez moi ?

- Toi, c’est différent. C’est contrasté. »

C’est vrai que c’était contrasté, chez l’allumette enflammée. Un mur vide et blanc, un autre peint et tapissé sur lequel sont scotchés des centaines de dessins, tous différents, au fusain, feutre, encre, crayon… Un salon plein de douceur et une chambre froide, impersonnelle. Une cuisine nette et un bureau en bordel, qui ne me rendait même pas dingue et m’énervait tout à la fois.

« Toi, c’est différent. »

Elle prit un air énigmatique et nous poursuivîmes notre balade en silence.

« Tirade endiablée : « Tu le trouves con, toi ? Tu ne le connais pas dans ses colères ; il y est terrible. Oui, terrible. Mais si magnifique, si grandi par cette rage interne qu’on ne voit seulement dans ces moments où son sang fige ses yeux et ses mains. Et lorsqu’il parle, ses lèvres volubiles égrènent des mots si justes qu’il en est instantanément magnifié. Il est terrible dans sa colère. Et si beau. »

C’est ce que je lui ai dit, à ta blondasse complexée qui laisse toujours ses lacets la traîner en laisse.

Elle a fait mine de ne pas comprendre. »

Jour 50

Aujourd’hui, j’ai croisé Adrien alors que la fille contrastée et moi flânions devant des vitrines sales, essayant de me guérir de ma phobie du monde vivant. Adrien, c’est un gars qui essaie de suivre les cours avec moi, sauf que essayer ne suffit pas toujours. J’ai dû le distraire deux trois fois en lui parlant de mon allumette et mon esprit s’est embrasé en voyant la façon dont ses yeux déshabillaient ma fille contrastée qui m’abandonnait en rentrant dans un magasin pour me forcer à la sociabilité.

« J’ai bien envie de me curer les dents sur cette allumette.

- Tu m’écœures. Tu n’es pas épique.

- Pourquoi, toi tu l’es ? »

Silence. Il semble goguenard et je sens mes poings se serrer dans mes poches.

« Moi non mais elle oui. »

 

Adrien m’a chamboulé l’esprit avec ses idées perverses, trop humaines dans leur animalité. Je fixe ma fille contrastée de toute mon âme, comme si j’avais peur qu’elle courre se frotter contre la barbe-grattoir d’un autre, s’enflammer comme dans un mauvais western. Je la fixe et elle finit par s’en rendre compte, me sourit puis s’arrête, voyant que je ne veux pas la lâcher des yeux, au risque de devenir aveugle.

On est restés là, tous les deux dans la rue, à se dévorer des yeux, elle méfiante et moi éperdu et perdu.

Puis je l’ai enfin embrassée.

 

Ses gifles sont des baisers salés.

 

Je suis resté là, seul, une heure, deux peut-être, les yeux dans le vide.

Et elle est revenue.

Elle a pris ma main et nous avons continué notre chemin.

Jour 54

Après cette gifle, beaucoup de choses ont changé tout en restant exactement comme avant. J’ai gagné le droit de la voir tous les jours plutôt que le lundi en particulier, mais uniquement au gré de ses envies.

Elle me menait comme une mule dans un champ dont les œillères étaient ses deux mains et je me tournais vers elle comme un héliotrope vers son sourire. J’étais comme un chien d’aveugle guidé par son maître, je ne vivais que dans la crainte de la perdre sitôt l’avoir trouvée.

Et lorsque j’ai essayé de lui expliquer mes pensées, elle m’a coupé le souffle d’un baiser et a sourit délicatement, irradiant mes yeux et mes joues.

« J’ai des rubans, de l’imagination et une vie pour changer le monde. »

Et je l’ai cru, pauvre de moi, nouveau Candide.

Je crois que je ne voulais pas comprendre. Ça me permettait de penser qu’elle serait toujours avec moi.

Jour 56

Elle est éblouissante de maladresse. Quand elle tente de forcer le pas avec ses talons, on dirait les cabrioles d’un poulain à peine né, chancelant de grâce. Mon cœur se serre, j’ai toujours peur que ses trottinements ne l’emmènent brutalement vers le sol.

Silence, je n’entends plus le cliquetis de ses sabots sur le bitume. L’angoisse m’étreint en même temps que sa main. Elle n’a pas chuté, elle a juste vu quelque chose.

« Ecoute. Les oiseaux. Ils zinzibulent. »

J’ai adopté ce mot à tout jamais.

Jour 57

Non, je n’ai pas oublié son nom, il tourne dans ma tête comme le refrain d’une chanson énervante. C’est son visage que j’ai oublié.

Elle, elle n’a pas oublié le mien, car quand je la croise sans la voir, elle ne me regarde pas. Je ne me souviens pas de son visage mais je sais qu’elle est là, c’est la seule qui se détourne. J’aurais dû lui apprendre que quand on ne voit pas quelqu’un, on papillonne tout autour de lui.

Il n’y a que celui qui a déjà vu qui détourne le regard avec application.

J’ai hâte de ne plus la croiser et que son prénom s’enlise dans les méandres mouvantes de mon cerveau détraqué.

Pourquoi aurais-je besoin d’elle à présent ? J’ai enfin ma fille contrastée, celle qui m’aveugle chaque jour de ses couleurs.

Pas de jour

Ça m’a pris comme ça, d’un coup. Ça faisait des mois qu’elle traînait dans ma poche. Bien sûr, je n’ai pas mis un genou à terre pour lui sortir le grand jeu. Non, j’en serai proprement incapable. J’ai à peine eu le courage de glisser la boite entre ses doigts fins et longs comme des baguettes de saule, des baguettes souples qui battaient la musique comme pour l’apprivoiser alors que nous assistions tous les deux à un concert en plein air. On était tombés dessus au hasard, sur ce concert. Au début on ne faisait que de se balader en silence, comme à notre habitude, puis on avait décidé de rester.

Je ne crois pas aux coïncidences. Quoiqu’il en soit, j’ai glissé la petite boite anormalement lourde dans sa main avant de retirer la mienne.

C’est elle qui est tombée à genoux. Enfin, elle s’est accroupie sur la pointe de ses pieds, comme lorsqu’elle étudie quelque chose avec attention. Elle a posé le petit coffret par terre et s’est absorbée dans la contemplation de ce cheveu fin enroulé, fil d’or torsadé sur lui-même.

Elle a détaillé mon petit anneau pendant des secondes interminables.

Je voulais pas d’une grosse bague. Ça aurait fait moche à son doigt. Et puis ça aurait été prétentieux ; je ne l’aime pas autant que ça, pas comme ça.

J’attends une réponse. C’est long.

Et puis elle se lève, désolée, en laissant ma demande à terre, comme pour mieux la piétiner de sa douceur.

« Je suis navrée mais… lorsque j’étais petite, j’ai fait une promesse. Je me suis dit que j’épouserai l’homme qui fera tomber la neige en juillet pour moi. Et si jamais ça arrive… Je ne veux pas te faire souffrir. »

J’ai senti mon cœur se noyer de détresse. J’aurais voulu hurler, lui jeter dans les dents qu’elle me faisait déjà assez bien souffrir par sa présence, crier qu’elle me rendait malade, encore plus malade que le bordel dans ma tête, parce que le bordel imaginé, c’est rien à côté d’elle, le bordel vivant, la fille aussi fine et fragile qu’une allumette, mon éphémère fille contrastée…

« Tu me quittes pour toujours ? »

Elle a sourit, illuminant une énième fois mes yeux.

« Non. Je t’ai déjà dit que je n’aimais pas les adieux. »

J’ai montré l’anneau qui luisait faiblement de son or au sol.

« Faut que tu le prennes. Je peux pas, moi. »

Elle a caressé la boite ouverte du bout du pied, comme si elle jouait avec un petit serpent, un fauve, un animal sauvage.

« Je sais pas.

- S’il te plait. »

Elle l’a saisit et l’a passé délicatement à un de ses doigts diaphane, le rangea au milieu de son innombrable collection de bagues.

« Non, vraiment, je déteste les adieux. »

Et ma fille contrastée m’a sourit et s’est approprié ma main.

« Note toute petite n°5.

Guilhem, j’ai des secrets, de terribles secrets que je ne veux en aucun cas te voir porter… Je veux seulement que tu me supporte, moi, l’extravagante colorée que tu surnomme fille contrastée…

Pour le temps qu’il me reste avec toi.

Lise »

Jour au hasard

Mes doigts caressent la surface froide d’un médaillon, l’étudient, le réchauffent. C’est un de ces bijoux à l’ancienne, vieille-France, du type où l’on peut retenir quelques instants secrets, par une minuscule photo d’un amant ou de famille emprisonnée. Mes ongles trouvent une rainure dans le métal lisse, s’y agrippent avec brutalité en comparaison à la douceur émanant de cette surface et violent son intégrité. Une petite touffe de poils volète langoureusement avant de s’affaler voluptueusement dans sa main craintive. Elle ferme le poing et le serre contre son ventre, tendue.

« Qu’est-ce que c’est ?

- Rien qu’un petit morceau de fourrure. »

Elle baisse les yeux et je retiens le pourquoi qui me brûle les lèvres de jalousie.

Je suis jaloux d’une pincée de poils.

« Mot explicatif : coucou. Il faut bien que je te l’explique, à toi. Mais à chaque fois, ces mots si durs se bloquent dans ma gorge, je ne peux pas les sortir. Alors je souris.

Un virus grignote mes lymphocytes comme des biscuits apéritifs, Guilhem. Un petit virus minuscule qui laisse dans son sillage des miettes de mon système immunitaire. Il me croque négligemment comme une allumette de pâte feuilletée. Quel goût ? Jambon-fromage ou tomate-basilic ? Cet égoïste ne veut même pas partager, il ne reste rien pour toi.

Quelque chose d’infinitésimal nous sépare. Mais c’est une distance que je ne pourrais jamais parcourir. »

Jour de la fin

« Je ne peux pas t’aimer. C’est dangereux. »

Ça a l’air douloureux à dire. Mais je comprends. Si elle brûle d’amour, ça finira par la consumer. Et plus de fille contrastée. Plus de sourire soleil. Fin de l’allumette qui m’aura en plus brûlé les doigts. Seulement.

Elle m’a rendu la bague réchauffée à la chaleur de ses sourires et elle est partie, noire, décontrastée, tache floue sur ma rétine voilée de larmes.

Je crois que moi non plus, je n’aime pas les adieux.

Je n’aime pas ses adieux.

«Dernière note.

 Avant, j’étais persuadée que si je regardais quelqu’un dans les yeux, il allait me voler mon âme. Puis, en grandissant, je me suis dit que ce n’était pas grave, je n’avais plus envie d’en avoir, d’âme, c’est affreusement compliqué et ça fait très mal quand on a une maladie d’âme.

J’avais tort.

Peut-être que ma maladie d’âme s’est déclenchée à ce moment-là ?

Mon âme s’est mise à boire et moi qui était parfaitement sobre, je subissais ses éclats de joie tout comme ses dépressions. Comme j’aurais bien aimé m’en débarrasser, de cette foutue âme !

Mais en même temps, j’étais contente qu’elle soit là. Ses troubles d’humeur me rendaient pratiquement clairvoyante, on avait l’impression qu’elle communiquait avec d’autres, inscrites au cercle des Alcooliques Amonymes ! J’esquissais des scènes si touchantes ; et pourtant invécues. Des douleurs qui me transperçaient. Des chagrins qui étaient à la fois miens et inconnus ; mix improbable de toutes mes vies antérieures.

C’était une période où je souriais peu, ou bien j’éclatais de rire, un rire nerveux associé à une crise, un bon trip de mon âme. Totalement blasée, je m’étais promis de ne plus supporter le joug de ces réactions chimiques aléatoires que m’imposait mon âme délurée, shootée et alcoolique de romans, de sensations fortes, une âme marginale qui me susurrait son envie d’en finir et de vivre dans le rêve pour toujours, de vraiment vivre dans un rêve.

De tout laisser tomber, de m’enfermer dans mon âme, avec elle, de ne plus espérer des autres ; et surtout pas leur amour…

Voilà sept petites notes pour toi, Guilhem. Sept est un chiffre magique, tu sais ? Le chiffre de la renaissance, peut-être.

J’ai collé ce feuillet, il est perdu au milieu des pages vierges de ton carnet, dans l’espoir que tu découvre un jour ce trésor, celui qui j’aurai élaboré pour toi.

Tu sais, le bout de fourrure… c’est un petit garçon qui me l’a offert.

Un petit garçon aveugle qui m’a trouvée alors que j’étais triste après avoir appris « la » nouvelle et qui m’a confié la seule chose qu’il aimait voir, parce qu’il voyait en touchant, Guilhem, comme un dieu immatériel qui caresse les choses… Il a été magique, cet enfant rêveur, il m’a montré que l’obscurité ne vaudra jamais la merveilleuse banalité des couleurs et il m’a appris à réchauffer le cœur des gens par mon sourire comme un rayon de soleil caresse les visages au printemps.

Et pour m’apprendre tout ça, il m’a juste offert son morceau de fourrure ; « pour te consoler, fille noircie qui rêve de couleurs ».

Et je suis devenue ta fille contrastée.

Lise »

Jour d'après

Une neige printanière camoufle ce sol si gris, un lit de pissenlit vaporeux recouvre l’herbe triste comme un linceul.

Relire ce journal me ferait trop mal. Je préfère le confier à quelqu’un. Quelqu’un qui saurait quoi en penser, de cette fille qui disparait sans prévenir.

Elle ne veut plus me voir.

Elle est venue comme ça, simple comme tout. Ses cheveux bleus presque blancs formaient une auréole autour de sa tête. Simple. Pas de collier, de contraste, de bagues.

Pas de bagues, sauf une, une seule. La dernière.

 

Elle a retiré doucement le cheveu d’or de son doigt et elle me l’a rendu, sans me regarder dans les yeux. Moi, je l’ai jeté au loin, cet anneau délicat qui représentait quelque chose qui me semblait impossible, je ne pouvais pas être amoureux d’une humaine. Je l’ai lancé et après je l’ai écrasé, comme un insecte que l’on dédaigne.

Et quand je me suis retourné, il n’y avait déjà plus rien que l’obscurité ; éclipse infinie du soleil de ma vie.

 

Pourquoi ressassé-je cette scène en continu ?

Dernier Jour

Je ferme les yeux et je l’imagine aussitôt. Mais ce n’est pas elle, c’est plus qu’elle, c’est elle et moi. C’est elle sans moi.

Encore une nuit où elle m’a évité même dans mes rêves. Encore des heures d’insomnies à chercher pourquoi elle s’échappe.

« Je ne peux pas t’aimer. C’est dangereux. »

Peut-être qu’elle ne peut pas, mais moi je ne l’ai pas fait exprès.

Je l’aime et je cherche à foutre le feu à tout prix à une allumette mouillée qui m’a déjà allumé. Je crame littéralement d’une passion brulante qui dévore mon sommeil riche de cauchemars où elle ne revient jamais.

Un éclair de lucidité me réveille et je me précipite à la fenêtre, hors de l’orage de mes songes. Une neige estivale refroidit mes espoirs.

 

Je cours mais je sais déjà qu’il est trop tard, cette foutue neige propre entrave mes pensées comme un grain de quartz blanc dans une mécanique bien huilée quoique pas si bien en fin de compte, on parle quand même de ma tête, là.

Il neige en juillet et mon coquelicot se fane.

Sottement, j’ai laissé échapper mon dernier mot.

« Pourquoi ? »

Il résume tout. C’est tout ce qu’il me manque pour comprendre.

Mais elle sourit et ses yeux ne me répondent pas. Ils viennent de cesser de battre. Juste avant que je n’arrive.

Ses cheveux sont redevenus sages. Cela faisait un certain temps qu’elle ne voulait plus me voir. Je prends conscience que je ne savais rien d’elle, même pas qu’elle avait une sœur, des parents. Une famille.

Elle parait si terne, ma fille contrastée. L’allumette s’est consumée.

 

~Bezuth

Date de dernière mise à jour : 10/03/2017

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