Poésie

Les seules larmes auxquelles elle peut désormais prétendre sont celles que la pluie lui prête.

"Salut. Ça va ?"

Il n'avait pas eu de nouvelles depuis leur dernière session. Il avait beau la spammer de SMS plus ou moins sérieux ou de messages débiles sur leur chat, elle ne répondait pas. Déçu, il reposa son portable. Pour sauter dessus à la première vibration. Mais ce n'était que Camille.

"Tu viens ? On va boire une bière pour l'anniversaire de Sandra !"

Un peu amer, il attrapa son manteau et claqua la porte, sans se rendre compte qu'un message clignotait sur le chat.

"Beaucoup de menaces, mais je ne vois aucun spoil sur Spider-Man dans cette conversation. Pas mal de blagues Carambar par contre"

Il respira profondément, taraudé par la réflexion de Camille.

"Dis... J'ai une question un peu conne"

"Vas-y"

"Pourquoi moi ?"

"Pourquoi pas ?"

"Tu as très bien compris ma question."

Il eut le temps de faire sa lessive et de préparer le dîner avant que son portable ne lui annonce une réponse.

"Tu as le temps de jouer, ce soir ?"

"Alors, vexée par la misère que je t'ai mis ?"

"Nope. Repas de famille"

Il leva un sourcil troublé et se tourna vers Camille.

— Tu manges pas avec tes parents, ce soir ?

— Non, on s'est vus le week-end dernier. Pourquoi ?

— Il me semblait que tu m'avais dit un truc du genre...

"Camille est pas avec vous ?"

"Repas de BELLE – famille"

"Mince. Puisque je ne peux pas te mettre de nouvelle branlée, je vais me contenter de te servir de distraction alors"

"Je risque de pas beaucoup répondre. On passe à table"

"Le moment idéal pour te spoiler Spider-Man"

"NON"

"Éteins ton téléphone, c'est malpoli"

Son rire étranglé tira Camille hors de son jeu.

— Bah dis-donc, ça a l'air d'être l'amour fou entre vous. Tu me présenteras ?

Une vague de honte agressa ses pommettes.

— Ça va pas être possible.

— Ah ?

— Elle est... en couple.

Camille blêmit.

— Merde... Tu sors avec une fille en couple ?

— On n'est pas ensemble, Camille, merde !

Il se leva brutalement du clic-clac de Camille et enfila ses chaussures.

— Je l'ai jamais vue !

Il claqua la porte un peu trop violemment.

Cafuné n'est pas à proprement parlé un mot perdu, mais plutôt un mot intraduisible.

C'est une vocation qui m'a attrapé, comme ça. Je ne l'ai pas vraiment choisie ; elle a frappé à ma porte un beau matin, sous la forme d'un petit nuage bourré de pluie et mon coeur délaissé s'est entiché de cette boule de coton mouillé.

— Salut, m'a-t-elle dit, ça te dérange de m'héberger ?

J'ai secoué la tête, un peu sidéré par ce mirage, et mon salon s'est transformé en champ de nuages.

Ce n'est qu'une lubie. Elle passera.

"Déesse aux yeux pers, éclaire-nous de ta sagesse !"

Vous pouvez retrouver cette couleur dans le regard mutin d'une Colombine acidulée.

Un loup roussi en guise de renard dont les rubans, lâches, m'enserraient d'autant plus le crâne. Les yeux du masque n'étaient pas en face des trous, battements de paupières impromptus au rythme des pas de danse qui occultaient mon âme comme deux volets rendus fous par le vent.

"Connaissez-vous le conte du Chat Botté ?

- Sans doute.

- Alors appelez-moi Marquis.

- Très bien, mais Marquis de quoi ? Carabasse ?"

Je me penchais en avant avec un sourire.

"Pourquoi pas le Marquis de vos Nuits ?"

Stories.

These are just stories.

Stories of how I'd like to have met you. And stories about how I will forget you.

Tu l'as croisé dans La Fée émerveillée, voici le premier des Mots Perdus que tel Peter Pan je collecte hors de l'oubli !

Sottement, j'ai laissé échapper mon dernier mot.

"Pourquoi ?"

Il résume tout.

C'est tout ce qu'il me manque pour comprendre.

J'ai besoin de passion, de drames.

Mon coeur s'emballe rien qu'à cette idée, je m'enflamme pour une illusion qui n'existera jamais que dans mon esprit où dansent des doubles de moi-même, éclatantes de majesté, bénies par une bonne étoile qui ne compte pas me visiter.

Emma Bovary de chair et de vapeurs, je vis par procuration mes rêves, oubliant d'être tout simplement.

~Bezuth

Ses lèvres de soie papillonnent au coeur à corps dans un bruissement vermeil qui résonne dans mon être comme un écho de son futur, vieille prostituée aux pétales fanés par de trop courts baisers.

~Bezuth

Le livre luisait faiblement dans le clair-obscur. Sur sa couverture se découpaient des volutes qui s'entremêlaient dans un dessin entêtant. Il semblait que l'encre qui avait servi à leur esquisse était de l'argent liquide. Elle posa sa main sur le livre et celui-ci se mit à chanter. Après un instant, elle osa à nouveau toucher le livre et l'ouvrit. Les volutes couraient là aussi sur toutes les pages dans un entrelacs délicieux. Des éclats de lumière parcouraient les traits orangés et des choeurs chantaient en sourdine.

2984 est une micronouvelle écrite pour le concours Radio France.

Il y avait deux contraintes majoritaires : écrire sur la liberté en 1000 caractères.

Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de vous poser des limites, mais ce n'est pas facile de supprimer des mots "en trop", surtout quand ceux-ci deviennent au final des phrases, voire des paragraphes entiers à retirer car ils ont perdu leur sens à cause de ce petit mot qui vous a fait gagner cinq caractères.

Et puis, la liberté. C'est vaste comme thème. C'est vaste et réduit à la fois, puisque ça doit tenir dans 1000caractères.

J'ai beaucoup griffoné, raturé, réécrit. Puis j'ai recommencé, parce que j'ai eu une idée. 2984 fait référence à une oeuvre d'anticipation dystopique, 1984 de Georges Orwell. Il faut donc lire cette nouvelle avec, en tête, l'histoire de 1984 : on se retrouve dans un monde totalitariste où même la pensée est contrôlée ("Big Brother is watching you").

Le mot liberté prend alors un sens particulier ; c'est une chose inaccessible, même interdite ! Mon narrateur a vécu cette période de transition où la liberté a été abrogée : il refuse à présent de vivre dans un monde lissé où chacun est semblable à son voisin. Mon narrateur est l'humain lambda qui peut survivre mais qui ne peut pas vivre.

Pourquoi 2984 me demanderiez-vous ? Réfléchissons un instant sur la situation en cours. Et si notre futur était déjà écrit dans notre bibliothèque ?

~Bezuth

Ma mémoire est pareille à ce ticket de caisse ; elle persiste quelques mois puis s'estompe tout doucement, sans qu'on s'en rende compte, jusqu'à ce qu'il soit trop tard et que le papier redevienne vierge.

Et là, vous pouvez oublier la garantie.

~Bezuth

Bonjour.

Ne faites pas attention à moi ; je vais aller m'installer dans le fond de la salle et vous ne me verrez plus. Je serai l'invisible qui est partout, qui assiste à tout sans jamais intervenir.

Mais voilà, aujourd'hui j'avais envie de vous dire bonjour, pour que vous sachiez que j'existe.

Parce que même s'il ne reste que moi, ce sera toujours ça, pas vrai ?

~Bezuth

Quand j'étais petite, j'rêvais d'être Anastasia

(Une des seules princesses qu'ont jamais eu de "Disney Mania").

Mais les Romanov c'est pas vraiment un conte de fées

C'est plus le genre histoire de réalité.

~Bezuth